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Lumière sur… Le 15 août et les fêtes de la mer
LES ARCHIVES MUNICIPALES DE LÈGE-CAP FERRET ONT POUR VOCATION DE CONSERVER LES ARCHIVES PUBLIQUES, MAIS AUSSI DES DOCUMENTS PRIVÉS, UNIQUES ET PARFOIS PERSONNELS. TOUS LES MOIS, DÉCOUVREZ UN DOCUMENT INÉDIT SUR VOTRE COMMUNE ! PAR SON INTÉRÊT HISTORIQUE, SON ASPECT ESTHÉTIQUE, OU SON ORIGINALITÉ, CE DOCUMENT TÉMOIGNE DE LA MÉMOIRE LOCALE.
Quel est le lien entre Louis XIII et Napoléon Bonaparte ? Comment deux hommes nés à plus de 160 ans d’intervalle peuvent-ils être liés, à part, bien sûr, comme monarque de la France ? Par une date bien particulière, le 15 août ! Sur la Presqu’île, les Fêtes de la Mer rythment cette journée estivale du village du Canon. Croyants ou non, habitants ou vacanciers, les Fêtes de la mer sont l’occasion de partager un moment de convivialité et de festivité, au-delà de la dimension religieuse du 15 août. Révisons ensemble son histoire avant les réjouissances !
Les origines du 15 août et des fêtes de la Mer
L’Assomption – à ne pas confondre avec l’Ascension – commémore la gloire de Marie avec Dieu au terme de sa vie terrestre, soit le moment où la Vierge Marie, mère de Jésus, est « montée au ciel ». Le terme « assomption » provient du latin assumere (« assumer », « enlever ») qui signifie « prendre avec soi ». Depuis 1802, l’Assomption a été fixée comme fête légale en France.
Les fêtes de la mer étaient à l’origine des cérémonies religieuses qui précédaient le départ des navires avant les longues campagnes de pêches. Les hommes passaient de longs mois en mer. Les femmes s’adressaient alors à la Vierge Marie pour lui demander de protéger leur mari, leur frère ou leur fils.
La Chapelle de L’Herbe, de son nom originel Sainte-Marie du Cap, et l’église Notre-Dame-des-Flots au Cap Ferret reflètent ce lien entre la Vierge Marie et le monde maritime. A L’Herbe, la statue de la Vierge à l’Enfant domine l’autel, et un ex-voto sous la forme d’un modèle réduit d’un navire à voiles du XIXème siècle surplombe l’allée centrale. Les ex-votos sont traditionnellement installés sur les façades maritimes pour la protection des marins en mer ou en guise de remerciements. Au Cap Ferret, le thème maritime est partout, dans la nef principale, en forme de coque de bateau renversée, dans la statue de la Vierge en bois flotté, dans les filets de pêche décorant les murs, etc.
Lors de ces fêtes de la mer, une messe est célébrée en plein air et les bateaux de pêche pavoisés sont bénis. Une gerbe de fleurs est déposée en mer, en mémoire de ceux qui y ont péri.
Fêtes de la Mer au Canon en 1950 – Les communiantes jettent une gerbe de fleurs (fonds Luc Dupuyoo, Archives municipales de Lège-Cap Ferret)
Des compétitions accompagnent les festivités, par exemple des régates de bateaux. En 1963, un concours Intervilles est organisé entre les villages du Canon et de L’Herbe, ainsi que des régates (pinasses à voiles, pinasse à deux ou quatre rameurs).
Dans les années 1980, le ministre de la culture Jack Lang a initié un regain d’intérêt pour le patrimoine en général et la culture maritime en particulier.
jour férié depuis Louis XIII !
En 1637, après plus 20 ans de mariage, Louis XIII et Anne d’Autriche n’ont toujours pas d’héritier. Le roi, très pieux, consacre alors la France à la Vierge Marie sous le titre de son Assomption afin d’avoir un fils. Son vœu du 10 février 1638 demande également à ses sujets de faire tous les 15 août une procession dans chaque paroisse. Le futur Louis XIV, Louis-Dieudonné (« donné par Dieu »), naît le 5 septembre 1638. Le 15 août devient fête nationale et un jour férié jusqu’à la Révolution de 1789.
En 1806, l’empereur Napoléon Ier institue le 15 août comme jour de fête nationale. Jour de naissance de l’empereur, cette date est décrétée « Saint-Napoléon » par un décret impérial du 19 février 1806. Le 15 août coïncide également avec l’Assomption et la ratification du concordat de 1801 par le pape Pie VII (un traité entre la République française et le Saint-Siège réglant les relations entre la France et l’Église catholique). C’est le jour du rétablissement de la religion catholique en France. Avec le retour du régime monarchique, le 15 août devient la fête du Roi. Sous la Deuxième République, un décret du 16 février 1852 du prince-président Louis-Napoléon Bonaparte, futur Napoléon III, remet à l’honneur la Saint-Napoléon, dite encore fête de l’Empereur, pour la journée du 15 août.
Le 14 juillet n’est officiellement consacré en tant que fête nationale républicaine qu’en 1880. Le 15 août redevient alors une fête liturgique où les Catholiques y célèbrent la Vierge Marie. La République française reconnait la fête de l’Assomption comme un jour férié (et non chômé, il est donc possible de travailler ce jour-là contre une compensation financière).
Les édiles de Lège, eux, n’ont pas chômé par le passé pour le 15 août ! A 15 reprises, ils se sont réunis en session ordinaire à la mairie pour s’occuper des affaires de la commune. La première fois en 1840 pour installer et faire prêter serment à François Ducamin, adjoint au maire, puis en 1874, 1878, 1880, 1882, 1885, 1886, 1889, 1893 (pour la création d’un facteur et de l’école de Piquey), 1895, 1897, 1912, 1926, 1931 et enfin 1937.
Rétrospective sur la Presqu’île
En 1922, un correspondant de La Petite Gironde relate le succès de la fête du 15 août au Cap Ferret :
« Les vacances du 15 août ont attiré cette année une foule considérable sur la presqu’île du Cap Ferret où parents et amis sont venus rejoindre les leurs, s’entassant et campant au besoin, pour la circonstance. Certes, on pouvait se le permettre, le temps délicieux s’ajoutant au charme des fêtes.
Disons en passant combien cette journée du 15 août a été rehaussée par l’éclat de la fête religieuse à la chapelle Bélisaire-Notre-Dame-des-Flots. Les bonnes volontés ne firent pas défaut et il nous fut permis d’entendre les voûtes résonner de chants harmonieux.
Honneur au fondateur, à celui qui eut l’excellente idée de doter ce coin de terre du Cap Ferret d’une chapelle, qui est une des causes principales du développement de ce beau site.
Disons également la belle éloquence de M. L’abbé Hermès, de la cathédrale de Bordeaux, qui développa la puissance et l’exemple de la reine du ciel.
Belle journée, en vérité, et à tous nos bien vives et sincères félicitations. »
Capture d’écran de la vidéo des Fêtes du Canon de 1955 (Vues du Cap, Cinémathèque de Nouvelle-Aquitaine)
En 1959, la messe en plein air est célébrée par l’abbé Marquaux, en présence du Cardinal Maurice Roy (1905-1985), archevêque de Québec. La procession de 300 navires s’étire lentement sur deux kilomètres et reçoit la bénédiction depuis le débarcadère de la Villa Algérienne. « Par brise légère et sous un ciel sans nuage », raconte le journaliste de Sud-Ouest, « cette promenade en mer est un véritable enchantement, et d’un bord à l’autre s’échangent de gais propos ponctués par les embruns. […] Toujours émouvantes et toujours colorées, ces fêtes de la mer ont revêtu, cette année, semble-t-il, une ampleur exceptionnelle et par la beauté du spectacle qui bénéficia d’un temps idéal, et par le nombre des participants – qui ne cesse de croître. »
Quelques photographies des Fêtes de la Mer dans les années 1960 :
Fêtes de la Mer au Canon en 1961 – Passage devant l’Hôtel Chantecler à Grand Piquey (fonds Luc Dupuyoo, Archives municipales de Lège-Cap Ferret)
Fêtes de la Mer au Canon en 1964 – La foule amassée sur les bords du Bassin pour assister au défilé nautique (fonds Luc Dupuyoo, Archives municipales de Lège-Cap Ferret)
Fêtes de la Mer au Canon en 1964 – Le bateau de la fanfare (fonds Luc Dupuyoo, Archives municipales de Lège-Cap Ferret)
Dans son autobiographie, Cap Ferret, ma presqu’île, Madame Lescarret-Lacrampe se souvient des fêtes du Canon de 1978 :
« Après la messe célébrée en plein air, sur la dune, face au bassin, la population s’est dirigée vers le débarcadère, pour assister au défilé des bateaux.
Autrefois, le prêtre donnait sa bénédiction du haut de ce débarcadère, aux bateaux qui défilaient devant lui ; il embarquait également sur l’un d’eux pour cette belle promenade sur l’eau. Cette belle tradition a été abolie et c’est bien dommage.
J’étais donc embarquée avec les officiels sur le canot de sauvetage, suivi de nombreuses barques pavoisées, la gendarmerie de la marine, le chalutier sur lequel avaient pris place les majorettes et leur fanfare, de nombreux autres petits et grands bateaux à voile et à moteur.
Un spectacle m’a réjouie ! Celui d’une pinasse à voile chargée de jeunes, qui a représenté pour moi celle de mon père des régates d’autrefois, quel spectacle inoubliable et que de souvenirs m’ont assaillie.
Un autre spectacle, non moins intéressant, a retenu l’attention de tous : 3 bateaux fleuris évoluant avec leurs cargaisons de jeunes travestis : le carnaval de Rio, la Tonkiti, les danses modernes, avec orchestres endiablés rythmant l’ensemble, c’est une chance qu’aucun d’entre eux ne soit tombé à l’eau, la surface des bateaux chalands qui les portaient étant assez réduite pour de telles exhibitions.
En rentrant du défilé, un vin d’honneur était servi dans les salons de la mairie, où après les discours d’usage, les prix ont été distribués à ces jeunes qui nous fait apprécier leurs superbes costumes vraiment dans la note et de très bon goût. L’un d’eux cependant n’est pas passé inaperçu ; un jeune prêtre dans sa soutane noire à large ceinture, petit chapeau rond, le bréviaire sous le bras, réservait une surprise aux paroissiens trop curieux demandant l’ouverture de son bréviaire, qui, oh ciel ! était une revue porno.
Un forçat est entré chargé de chaînes (en plastiques) qu’il a rompue face au public. Tout ceci dans une ambiance de fête que l’on retrouve toujours en vacances au bord du bassin, ou ailleurs. »
Votre histoire, notre mémoire
“Les souvenirs d’un homme constituent sa propre bibliothèque.”
Aldous Huxley, écrivain anglais (1894-1963)
Si vous avez des photographies ou des documents sur les fêtes du 15 août sur la Presqu’île, n’hésitez pas à nous rendre visite ou à nous contacter ! Vos souvenirs nous permettront de mieux faire connaître l’histoire de notre commune.
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Service des archives
79 avenue de la Mairie, Lège bourg
archives@legecapferret.fr
05.57.17.07.80
Sources et références
Les Archives municipales de Lège-Cap Ferret :
- Délibérations du Conseil Municipal de Lège
- Fonds Luc Dupuyoo
- Germaine Lescarret-Lacrampe, Cap Ferret, ma presqu’île, éditions La Pensée Universelle, 1979
Archives en ligne de Sud-Ouest :
- Sud-Ouest, 17 août 1959
RetroNews, le site de presse ancienne de la BnF :
- La Petite Gironde, 19 août 1922
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